Masculinité déconstructible et déception chez la jeune génération : regard intergénérationnel sur le féminisme

De la philosophie à la militance : Nathalie, pionnière des années 70

À 74 ans, Nathalie incarne une génération qui a dû se battre pour obtenir des droits fondamentaux. Étudiante en philosophie à Fribourg dans les années 60, elle faisait partie des sept femmes sur 120 étudiants. Elle rappelle avoir compris qu il fallait lutter pour ne pas passer inaperçue, même si ce n était pas le seul critère qui la définissait.

Son parcours illustre les contradictions de l époque : militante de gauche engagée, elle suit néanmoins son mari à l étranger. Pendant que celui-ci avance dans sa carrière, elle renonce à ses propres ambitions académiques. Elle se souvient avoir été bouleversée par l abandon de son désir de faire carrière après le doctorat.

Le défi moderne : être féministe et mariée

Myriam, 33 ans, juriste et mère de deux enfants, connaît bien la tension entre engagement féministe et vie conjugale. Son activité se déploie largement sur les réseaux sociaux et la question qui revient souvent est de savoir comment être féministe et mariée. Sa conclusion est simple : être en couple signifie accepter que l autre ne soit pas parfait, et avancer ensemble sur ces questions.

Ce point de vue tranche avec l approche de Victoria, qui travaille pour la fondation Surgir et rappelle que le droit des femmes se construit aussi à partir de la vie intime. Elle souligne qu il peut exister un privilège perçu à ne pas être amoureux des hommes, ce qui peut épargner certaines situations. On note également la présence d hommes qui se disent déconstruits dans le seul but de séduire.

La génération désenchantée

Anne-Julie, 23 ans, résume la désillusion d une génération: certains hommes affichent une posture dite déconstruite pour séduire, et les jeunes femmes constatent une déception face à ces promesses. Victoria rappelle que des études évoquent un hiatus croissant entre les jeunes femmes et les jeunes hommes, et que les idées masculinistes progressent parallèlement aux avancées féministes.

La doyenne du groupe observe cette évolution avec inquiétude: les petites-filles s affirment et prennent leur place, tandis que les garçons semblent manquer de repères clairs quant à leur identité.

De la pilule aux nouvelles libertés

Sur les années 70, Nathalie rappelle que la libération sexuelle est apparue surtout comme une libération masculine: grâce à la pilule, les hommes étaient moins préoccupés par une grossesse potentielle, tandis que les femmes devaient repenser leur place et leurs choix. Cette période met en évidence l importance d un accès équitable à la contraception dans le cadre du féminisme.

Aujourd hui, certaines amie partagent les frais de contraception avec leur partenaire, illustrant une répartition plus équilibrée des responsabilités.

L intime devient politique

Pour Victoria, l intime est devenu politique, une réalité renforcée par les réseaux sociaux qui libèrent la parole sur la sexualité, le plaisir féminin et la convergence des luttes. Cette génération affirme sa colère et refuse de s excuser pour des propos perçus comme radicaux. Le défi collectif consiste à accompagner les filles et les garçons dans leur développement identitaire.

Luigi Marra

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