Genève inaugure le premier réseau quantique suisse, en quête de rattrapage technologique
Genève ouvre le premier réseau quantique du pays
L’inauguration a été marquée mardi lors du Quantum Industry Day au Centre international de conférences de Genève (CICG). Le Geneva Quantum Network (GQN) s’appuie sur des fibres optiques enterrées dans le canton et vise à soutenir les recherches menées par des physicien·ne·s travaillant sur la quantique.
Un projet au cœur d’un partenariat public-privé
Pour réaliser ces expériences, les équipes de l’Université de Genève (UNIGE) souhaitaient accéder à des fibres optiques dédiées. Le coût des locations et les négociations nécessaires ont conduit à la création d’un partenariat public-privé pour la mise en place du GQN. Le réseau réunit l’OCSIN, le CERN, la Haute école du paysage, d’ingénierie et d’architecture de Genève (HEPIA) et les entreprises ID Quantique et Rolex, avec son entité Rolex Quantum, spécialisée dans les horloges atomiques optiques.
Des expériences à grande échelle dans des conditions réelles
Selon Nicolas Brunner, professeur de physique quantique à l’UNIGE, les recherches s’appuient sur des « fibres sombres » non exploitées, car les expériences se situent dans le régime quantique, où l’on n’envoie que quelques photons à la fois. Le réseau dédié, dont les fibres ont été posées il y a plusieurs décennies, permettra d’expérimenter, tester et développer des technologies quantiques en dehors du laboratoire, dans des conditions réelles, selon le chercheur.
Leur approche exploite les propriétés de superposition et d’intrication des photons. La physique quantique est présentée comme ouvrant des perspectives pour les télécommunications—transferts ultra-rapides et sécurité des données—mais aussi pour la métrologie, avec des mesures temporelles d’une grande précision, précise le communiqué de l’UNIGE.
Photon intriqués et clés quantiques
L’infrastructure du réseau quantique suisse repose sur 262 kilomètres de fibres fournies par l’Office cantonal des systèmes d’information et du numérique. Dans un premier temps, les photons intriqués seront distribués entre les partenaires du GQN, et des signaux temporels ultra-précis seront diffusés via ce réseau, ce qui est essentiel tant pour les communications que pour la métrologie du temps. HEPIA mettra en place un capteur de température distribué le long des fibres, rendu possible par l’utilisation de photons uniques.
Des clefs quantiques seront également transmises sur ce réseau par ID Quantique, société fondée à l’époque par le professeur Nicolas Gisin (UNIGE), pionnier de l’extraction des photons intriqués hors du laboratoire lors d’une expérience menée en été 1997 sur plus de dix kilomètres entre Bernex et Bellevue, dans le canton de Genève.
Réactions et enjeux pour la Suisse
Le professeur Gisin, auteur de démonstrations majeures comme la téléportation quantique en 2006, se montre réaliste quant à l’ampleur du projet genevois. Il rappelle que, sur le continent européen, une vingtaine de pays disposent déjà d’un réseau quantique national, et que la Suisse demeure sans tel réseau jusqu’à présent. Selon lui, le Genève Quantum Network est « relativement petit et en partie bricolé », et il souligne que la Suisse a parfois été perçue comme lente dans ce domaine.
Il affirme aussi qu’il serait « dramatique » que la Suisse manque le tournant des technologies quantiques, tout en reconnaissant le rôle du GQN comme étape dans ce contexte suisse.
